Hawkins Bolden La vie de Hawkins Bolden a commencé en 1914, à Memphis (Tennessee).Sonhistoireestdure: souffrantd’épilepsie,ilperdlavue à l’âge de 8 ans lors d’un match de baseball, sport qu’il aime plus que tout. Pauvre, sans éducation, il reste confiné dans une famille où certains le croient habitéparle démon,maisilserasoutenutoutau longdesavieparsonfrèrejumeau et sa sœur. Malgré son handicap, il répare des radios pour pouvoir suivrelesmatchsdebaseballets’oc- cupedesonjardin.Etdanslesrues deMemphis,ilramassedesobjets de rebut avec lesquels il fabrique des«épouvantails»pour«fairefuir les oiseaux ». Souvent, ce sont des piècesdemétal(casseroles,pelles, récipients divers…), trouées pour figurer les yeux et dotées d’une longue langue… De plus en plus complexes,liésavecdufildefer,ses épouvantailsenvahissaientlittéra- lementsonjardin.En2005,Bolden ne s’est pas réveillé de sa sieste. Ike Morgan OriginairedeRockdale(Texas)oùil estnéen1958,IkeMorganasurtout vécu à Austin, où sa grand-mère et lui se sont installés en 1968. S’il a un peu travaillé pour la ville – il peignaitdesbouchesd’incendie– c’estsurtoutàl’hôpitald’Étatqu’il avécu.En1977,ilesteneffetarrêté pour le meurtre de sa grand-mère puis,diagnostiquéschizophrèneet jugéirresponsable,ilvapasserplus de trente ans au sein de l’institu- tionmédicale. C’est làqu’il se met à peindre des toiles patiemment couvertesdeplusieurscouchesde couleur,s’intéressantàdesfigures célèbres (voir détail ci-contre) comme George Washington ou Monna Lisa. Coloriste hors pair, il entasse ses œuvres sous son lit. C’est un artiste intervenant au sein de l’hôpital, Jim Pirtle, qui le «découvre»en1983.Enfinsortide l’hôpital,IkeMorganseconsacrera toutentieràsonart.Ceuxquil’ont rencontréracontentqu’ilestencore imprégnédelaculturedesannées 1970 – l’époque à laquelle il a été interné – et que, quand on l’inter- roge sur sa peinture, il répond : « Vous savez, peindre vous fait du bien,etquandlesautressesentent bienaussi,çac’estquelquechose!» Royal Robertson « Interdit aux prostituées divor- cées » clame un panneau peint par Royal Robertson (1936-1997). Marié pendant dix-neuf ans, père de11enfants,lepeintren’avisible- ment pas bien supporté le départ de sa femme. Vivant reclus en Louisiane, souffrant de schizo- phrénie, il s’est réfugié dans une foliecréatricestupéfiante.L’homme qui racontait avoir vu Dieu aux commandesd’unvaisseauspatial à l’âge de 14 ans créait des œuvres violemment colorées mélangeant citations de la Bible, images de l’espace sorties de bandes dessi- nées,textespersonnelsviolemment misogynes parfois signés « le pro- phète ». Sa maison fut détruite en 1992 par l’ouragan Andrew, mais deux collectionneurs l’aidèrent à obtenir une aide du gouverne- ment. À l’époque, sa renommée dépassaitdéjàleslimitesdesapro- priété. Certaines de ses œuvres sont conservées au Smithsonian American Art Museum. Freddie Brice Desanimauxnoirssurfondblanc, simples et expressifs. Un ours, un chat,unoiseau,unserpent…Mais aussi des tables, des chaises, des horloges, et la signature en lettres grasses: « F.B. ». L’homme est né en Caroline du Sud en 1920, a déménagé à Harlem pendant la grandecrise,avécudepetitsbou- lots – notamment comme peintre de bateaux au Brooklyn Navy Yard – et connu plusieurs incar- cérations et séjours en hôpitaux psychiatriques… Il a commencé à peindreaudébutdesannées1980, réduisantobjetsetanimauxàleur essencegraphiquetoutenleurdon- nantunepalpitanteprésence.Ilest morten1998,alorsquesesœuvres entraient dans les collections de musées comme le Philadelphia Museum of Art. ● VINCENT FOURNIER POUR JA JEUNE AFRIQUE No 2711-2712 • DU 23 DÉCEMBRE 2012 AU 5 JANVIER 2013 Culture médias 167 Dec 2012